03/05/2022

Le cimetière américain Meuse-Argonne (Romagne-sous-Montfaucon)

Le cimetière américain Meuse-Argonne se situe à l’est du village de Romagne-sous-Montfaucon à une quarantaine de km de Verdun.

C’est dans ce cimetière de 53 ha que repose le plus grand nombre de soldats américains morts en Europe (14246 au total). La plupart des soldats enterrés ici ont perdu la vie durant l’offensive Meuse-Argonne en 1918, la plus grande offensive américaine de la Première Guerre mondiale. Le large éventail de stèles se déploie en longues rangées au-delà d’un bassin central jusqu’à la chapelle qui couronne la crête.


Il y a une grande diversité entre les victimes inhumées au sein du cimetière : des artilleurs sur voie ferrée, des membres de l’expédition en Russie, des soldats afro-américains des 92e et 93e Divisions d’Infanterie, des femmes, des civils et des enfants. Neuf récipiendaires de la Médaille d’honneur sont enterrés ici, dont Freddie Stowers, un des deux afro-américains ayant reçu la Médaille d’honneur lors de la Première Guerre mondiale. Le mémorial comprend également un centre d’accueil présentant un film et une exposition originale expliquant l’importance de l’offensive Meuse-Argonne dans le contexte de la Première Guerre mondiale.



Entrée du cimetière côté Ouest
Inauguration du cimetière le 30 mai 1937, 20 ans après d’entrée en guerre des États-Unis 
en présence du général Pershing et du général Rivière, gouverneur général de Verdun,
du préfet et de plusieurs députés. 

 
Commémoration du centenaire de la libération de Romagne (2018)

Les deux entrées possèdent des portes monumentales surmontées d’un aigle. 

 

 



La zone des tombes sur le versant sud de la vallée est divisée en huit parcelles rectangulaires numérotées de A à H. Chaque parcelle est délimitée par des tilleuls.



Memorial Day


Medal of Honor, la plus haute distinction militaire aux Etats-Unis 

Chaque corps a sa propre stèle de marbre de Carrare blanc surmontée
d’une croix latine ou d’une étoile de David pour les sépultures israélites. 


La D123 traverse le site du cimetière et relie Romagne à Cunel

Le bassin central
Sur l’eau, flottent cinquante et un nénuphars représentant symboliquement les 50 Etats
de l’union et le district de Columbia, Washington. 

Le bassin central et au fond, l'entrée côté Ouest

Le centre des visiteurs 
Le grand bassin et le mémorial (au centre, la chapelle et sur les côtés les 2 loggias)

La conception de la chapelle est confiée à un architecte d'expérience, Louis Ayres, de la société York & Sawyer. Il donne à la chapelle son style « roman français qui est le genre de chose qui amènerait à penser que les Français l'ont eux même réalisé il y a très longtemps ». La chapelle est composée d'un bâtiment flanqué par deux loggias. Les arcades des loggias comprennent le Mur des Disparus recensant les noms des 954 soldats qui n'ont pas de sépulture identifiée. Une épitaphe stipule « Ici est leur mémorial, la terre entière leur sépulture. » L'ensemble est réalisé en pierre locale. L'inscription sur le fronton stipule que le monument est « dédié à la mémoire de ceux qui sont morts pour leur pays ». Sur le linteau au dessus de la porte majestueuse est écrit « Ils reposent dans un sommeil sacré». Le tympan prend la forme d'une arche romane avec deux figures en bas-reliefs représentant des allégories du Chagrin et du Souvenir. Ce style est caractéristique des monuments commémoratifs américains.


   
On aperçoit à gauche le Mur sur lequel sont gravés les noms des 954 Disparus

Les noms des 954 disparus sont gravés sur des panneaux dans les 2 loggias flanquant le mémorial 

Le linteau de la chapelle porte ces mots: « Ils reposent dans
un sommeil sacré ». Un bas-relief sur le tympan du portail représente
des allégories de la Douleur et du Souvenir. 

 
  


Des bannières américaines et alliées sont disposées autour de l'autel et sous la Croix. Le grand sceau des États-Unis d’Amérique (great seal of the United States of America) comporte un pygargue à tête blanche aux ailes déployées (symbole de souveraineté) tenant un rameau d'olivier dans une serre et treize flèches dans l'autre, l'ensemble symbolisant la paix ainsi que la défense par la guerre. L'oiseau est surmonté par treize étoiles rappelant les treize États originaux. Le pygargue a la tête tournée vers le rameau d’olivier, à sa droite, pour symboliser une préférence pour la paix.1 La bannière E Pluribus Unum (littéralement « De plusieurs, un ») rappelle la réunion des 13 États à l'origine des États-Unis. Les 13 colonies d'origine sont aussi rappelés par les 13 rayures du blason, les 13 flèches, les 13 feuilles et 13 olives du rameau d'olivier ainsi que par la phrase "E Pluribus Unum" qui contient 13 lettres.

La chapelle est ouverte tous les jours (sauf le 25/12 et le 01/01) de 9h à 16h45 Le centre des visiteurs est ouvert tous les jours (sauf le 25/12 et le 01/01) de 9h à 17h. Descente des couleurs tous les jours à 16h30

 



Les deux verrières ont été réalisées en 1920-1930 par Heinigke et Smith, peintres verriers à New-York. Elles représentent, en médaillons, les insignes des divisions et unités américaines affectées dans les American Expeditionary Forces (AEF) qui ont été engagées dans le conflit. Pendant 47 jours de combat, du 26 septembre au 11 novembre 1918, la Première Armée américaine imposa une retraite générale sur ce front. Le monument a été érigé par la Commission des monuments de guerre américains, une agence gouvernementale des Etats-Unis d'Amérique qui en assure également l'entretien. La libre disposition du terrain fut concédée, à perpétuité, par le peuple français.



Le vitrail ci-dessous situé dans la chapelle du cimetière militaire américain Meuse-Argonne représente l'insigne de la 82e Division d’Infanterie (82nd Infantry Division) constituée en août 1917 à Camp Gordon en Géorgie, avec des hommes provenant de tous les États des États-Unis, d’où le surnom « All-Americans ». Elle entre en campagne en France en 1918 où elle enregistre 1 298 tués au combat. Elle est dissoute après-guerre. L'unité sera reconstituée en 1942 sous la dénomination de 82e Division aéroportée (82nd Airborne Division) qui participera notamment à la Bataille de Normandie.

Insigne de la 82e Division

 
Insigne de la 93e Division


La carte de l'offensive Meuse-Argonne

De chaque côté de la porte, des panneaux en bronze figurent des animaux. La Chouette représente la vérité et la sagesse, elle porte l'esprit de ceux qui viennent de mourir. L'Ecureuil symbolise la foi et la vigilance. L'Aigle, Pygargue à tête blanche, bald eagle, est le symbole officiel des Etats-Unis, il représente la Liberté et la Puissance. Le Chien est un symbole universel de Loyauté et de Courage au combat.





L’American Battle Monuments Commission est une agence du gouvernement des États-Unis qui exploite et entretient 26 cimetières américains et 30 mémoriaux et monuments 17 pays. La Commission s'efforce de réaliser la vision de son premier président, le général des armées John J. Pershing. Pershing, commandant des forces expéditionnaires américaines pendant la Première Guerre mondiale, a promis que "le temps ne ternira pas la gloire de leurs actes".





Sources : 
Circuit vitrail en Argonne

23/04/2022

Le Tétramorphe

 Le mot tétramorphe provient du grec tetra (quatre) et morphe (forme). Il désigne les quatre vivants, les quatre animaux ailés qui tirent le char de la vision du prophète de l’Ancien Testament Ézéchiel. 

Il a été repris dans l’Apocalypse attribué à saint Jean (Nouveau Testament). Plus tard, saint Jérôme (fin du IVe siècle) associe les quatre « animaux » aux quatre évangélistes. Ces quatre symboles marquent également les quatre étapes de la vie du Christ : la naissance, la mort, la résurrection, l'ascension.

Fresque de Duilio Donzelli - Eglise Saint-Laurent (Rouvrois-sur-Meuse)
Maitre-autel de la basilique Notre-Dame (Avioth)
Maitre-autel de la basilique Notre-Dame (Avioth)
Fresque de Duilio Donzelli - Eglise Saint-Evre (Mécrin)
Fresque de l’église Saint-Denis de Juvigny-sur-Loison
Tympan du portail du Lion - Cathédrale Notre-Dame (Verdun)
Tympan du portail de l'église Saint-Sauveur (Verdun)
Clés de voûte de l'église Saint-Nicolas (Marville)

  • L’Évangile selon saint Matthieu est représenté par l’homme. L’Évangile commence par l’Incarnation, c’est la première étape de la vie du Christ (le Verbe s’est fait chair). L’Homme est le symbole de l’esprit et des pensées.
Fresque de D. Donzelli - Eglise Saint-Sébastien
 (Belleville-sur-Meuse)


  • L’Évangile selon saint Luc est représenté par le veau (bœuf ou taureau) symbole du sacrifice dont il est question au commencement de son Évangile. C’est la seconde étape de la vie du Christ : le sacrifice (la mort). Le taureau est le symbole du corps et des forces de l’Homme.
Fresque de D. Donzelli - Eglise Saint-Sébastien
(Belleville-sur-Meuse)


Médaillon du XIIe siècle provenant de l'ancienne abbaye Saint-Vanne
Musée de la Princerie (Verdun) 
  • L’Évangile selon saint Marc est représenté par le lion : Il évoque Jean-Baptiste, «la  voix de celui qui crie dans le désert » puissante et solitaire comme le rigidement d’un lion. C’est la troisième étape de la vie du Christ : la résurrection. Le lion est le symbole du cœur et des passions.
Fresque de D. Donzelli - Eglise Saint-Sébastien
(Belleville-sur-Meuse)
Médaillon du XIIe siècle provenant de l'ancienne abbaye Saint-Vanne 
Musée de la Princerie (Verdun)

  • L’Évangile selon saint Jean est représenté par l’aigle : Jean ouvre son Évangile avec le Verbe, la voix venue du ciel. C’est la quatrième étape de la vie du Christ : l’Ascension. L’aigle est le symbole de l’âme.

Fresque de D. Donzelli - Eglise Saint-Sébastien
(Belleville-sur-Meuse)

22/04/2022

Saint Georges

 Georges de Lydda est un saint martyr honoré le 23 avril. Personnage légendaire dont l’existence est mis en doute dès le Ve siècle, c’est le saint patron des chevaliers, de l’Angleterre, de la Géorgie, de l’Éthiopie, des scouts et des armuriers. Il est souvent représenté en chevalier qui terrasse un dragon à l’aide d’une lance, allégorie de la victoire de la foi chrétienne sur le démon (ou plus largement du bien sur le mal). Il ne faut pas le confondre avec saint Michel l’archange (ailé) qui lui, vainc le démon à pied. 

Saint Georges terrassant le dragon, école allemande du XVIe siècle, bois polychrome
 (Musée barrois, Bar-le-Duc)
Verrière, auteur non identifié (après 1928)
Église Saint-Maurice (Bras-sur-Meuse)
Verrière de Joseph Benoît, 1932
Église Saint-Barthélemy (Halles-sous-les-Côtes) 
Verrière de l’église Saint-Martin (Nubécourt)
Verrière de Georges Graff (vers 1925) 
Offert par Mme Vve Hanse-Monitor de Brieulles à la mémoire 
de son fils Georges Hanse mort pour la France le 12 juin 1918
Église de l’Assomption (Brieulles-sur-Meuse)
Verrière Sanctus-Georgius - Sanctus Martinus, Haussaire frères (1875)
Église Saint-Georges (Thonne-les-Prés
Monument funéraire - Eglise Saint-Martin (Nubécourt)
Tableau intitulé « Saint George Prié pour nous », auteur inconnu (1707)
Église Saint-Georges (Thonne-les-Prés)
Croix de Saint-Georges (symbole des croisés et drapeau de l’Angleterre) 

Ci-dessous, la légende de saint Georges racontée par Jacques de Voragine (1228-1298) dans La Légende dorée (1261-1266) 

Georges était originaire de Cappadoce, et servait dans l’armée romaine, avec le grade de tribun. Le hasard d’un voyage le conduisit un jour dans les environs d’une ville de la province de Libye, nommée Silène. Or, dans un vaste étang voisin de cette ville habitait un dragon effroyable qui, maintes fois, avait mis en fuite la foule armée contre lui, et qui, s’approchant parfois des murs de la ville, empoisonnait de son souffle tous ceux qui se trouvaient à sa portée. Pour apaiser la fureur de ce monstre et pour l’empêcher d’anéantir la ville tout entière, les habitants s’étaient mis d’abord à lui offrir, tous les jours, deux brebis. Mais bientôt le nombre des brebis se trouva si réduit qu’on dut, chaque jour, livrer au dragon une brebis et une créature humaine. On tirait donc au sort le nom d’un jeune homme ou d’une jeune fille ; et aucune famille n’était exceptée de ce choix. Et déjà presque tous les jeunes gens de la ville avaient été dévorés lorsque, le jour même de l’arrivée de saint Georges, le sort avait désigné pour victime la fille unique du roi. Alors ce vieillard, désolé, avait dit : « Prenez mon or et mon argent, et la moitié de mon royaume, mais rendez-moi ma fille, afin que lui soit épargnée une mort si affreuse ! » Mais son peuple, furieux, lui répondit : « C’est toi-même, ô roi, qui as fait cet édit ; et maintenant que, à cause de lui, tous nos enfants ont péri, tu voudrais que ta fille échappât à la loi ? Non, il faut qu’elle périsse comme les autres, ou bien nous te brûlerons avec toute ta maison ! » Ce qu’entendant, le roi fondit en larmes, et dit à sa fille : « Hélas, ma douce enfant, que ferai-je de toi ? Et ne me sera-t-il pas donné de voir un jour tes noces ? » Après quoi, voyant qu’il ne parviendrait pas à obtenir le salut de sa fille, il la revêtit de robes royales, la couvrit de baisers, et lui dit : « Hélas, ma douce enfant, j’espérais voir se nourrir sur ton sein des enfants royaux, et voici que tu dois me quitter pour aller servir de pâture à cet horrible dragon ! Hélas, ma douce enfant, j’espérais pouvoir inviter à-tes noces tous les princes du pays, et orner de perles mon palais, et entendre le son joyeux des orgues et des tambours ; et voici que je dois t’envoyer à ce dragon qui doit te dévorer ! » Et il la renvoya en lui disant encore : « Hélas, ma fille, que ne suis-je mort avant ce triste jour ! » Alors la jeune fille tomba aux pieds de son père, pour recevoir sa bénédiction ; après quoi, sortant de la ville, elle marcha vers l’étang où était le monstre.

Saint Georges, qui passait par là, la vit toute en larmes, et lui demanda ce qu’elle avait. Et elle : « Bon jeune homme, remonte vite sur ton cheval et fuis, pour ne pas mourir de la même mort dont je vais mourir ! » Et saint Georges : « Ne crains point cela, mon enfant, mais dis-moi pourquoi tu pleures ainsi, sous les yeux de cette foule qui se tient debout sur les murs ? » Et elle : « À ce que je vois, bon jeune homme, tu as le cœur généreux, et tu veux périr avec moi ! Mais, je t’en supplie, enfuis-toi au plus vite ! » Et Georges : « Je ne partirai point d’ici que tu ne m’aies dit ce que tu as ! » Alors, la jeune fille lui raconta toute son histoire, et Georges lui dit : « Mon enfant, sois sans crainte, car, au nom du Christ, je te secourrai ! » Mais elle : « Vaillant chevalier, hâte-toi de te secourir toi-même, pour ne point périr avec moi ! C’est assez que je sois seule à périr ! » 

Et pendant qu’ils parlaient ainsi, le dragon souleva sa tête au-dessus de l’étang. La jeune fille, toute tremblante, s’écria : « Fuis, cher seigneur, fuis au plus vite ! » Mais Georges, après être remonté sur son cheval et s’être muni du signe de la croix, assaillit bravement le dragon qui s’avançait vers lui et, brandissant sa lance et se recommandant à Dieu, il fit au monstre une blessure qui le renversa sur le sol. Et le saint dit à la jeune fille : « Mon enfant, ne crains rien, et lance ta ceinture autour du cou du dragon ! » La jeune fille fit ainsi, et le dragon, se redressant, se mit à la suivre comme un petit chien qu’on mènerait en laisse.

Mais, en le voyant s’avancer vers la ville, les habitants épouvantés prirent la fuite, bien certains que tous allaient être dévorés. Saint Georges leur fit signe de revenir, et leur dit : « Soyez sans crainte, car le Seigneur m’a permis de vous délivrer des méfaits de ce monstre ! Croyez au Christ, recevez le baptême, et je tuerai votre persécuteur ! » Alors le roi et tout son peuple se firent baptiser ; on baptisa, ce jour-là vingt mille hommes ainsi qu’une foule de femmes et d’enfants. Et saint Georges, tirant son épée, tua le dragon, qui fut emporté hors de la ville sur un char attelé de quatre paires de bœufs. Et le roi fit élever, en l’honneur de la sainte Vierge et de saint Georges, une immense église, de laquelle jaillit une source vive dont l’eau guérit toutes les maladies de langueur. Le roi offrit aussi à saint Georges une grosse somme d’argent ; mais le saint, sans rien prendre pour lui, la fit distribuer aux pauvres. Il enseigna ensuite au roi quatre choses : Il lui apprit : 1° à avoir soin de l’église de Dieu ; 2° à honorer les prêtres ; 3° à suivre assidûment les offices divins ; 4° à garder toujours le souvenir des pauvres. Après quoi, ayant encore embrassé le vieux roi, il prit congé de lui.

D’autres auteurs racontent cependant l’histoire d’une autre façon. Ils disent que, au moment où le dragon s’avançait pour dévorer la jeune fille, saint Georges, ayant fait le signe de la croix, se jeta sur lui et le tua du coup.

Manuscrit enluminé vers 1500