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12/01/2023

L’Hôtel de Ville de Verdun

L’abbé Gabriel nous rappelle, dans « Verdun, notice historique » rédigée en 1888, que les pouvoirs municipaux de Verdun, avant d’occuper l’hôtel particulier actuel, étaient installés à la maison de Montaulbain, achetée en 1388 et située à la montée de « Chastel », appuyée au vieux rempart du Castrum ayant vue sur la place Mazel. Elle avait son beffroi, car toute ville du Moyen-âge avait son beffroi, où se trouvait le bourdon populaire ou la Mute. Celui de Montaulbain avait son beffroi dont la flèche était entourée de clochetons et surmontée de la double aigle allemande, aux ailes éployées, qui servait de girouette. En 1680, Louis XIV y installe le premier maître échevin français dans l'hôtel. 

L’Hôtel de Ville de Verdun (côté jardin)

En même temps qu'elle servait d’Hôtel de Ville, la Maison Montaulbain servait aussi de prison civile ; et elle resta prison jusqu'en 1811. D'où est venu à la rue, le nom de rue de la Vieille Prison. Mais, le voisinage des prisonniers n'était pas chose gaie, d'autant plus qu'il y avait là une salle pour la torture ; et puis la Maison-Montaulbain se faisait vieille. La Ville acheta l'hôtel actuel.

Une tradition, couramment acceptée, indique Edmond Pionnier dans « Verdun, promenade historique et pittoresque », publié en 1901, veut que l'hôtel de ville actuel ait été destiné à la reine Marie de Médicis. Ce palais, dont l'origine remonte à 1623, est dû à la magnificence de Nicolas Japin, commissaire des  poudres et des salpêtres pour l’armée du Roi.

L’hôtel particulier du XVIIe où siège depuis 1738 le premier édile de Verdun

Lorsque Marillac devint gouverneur vers le milieu de l'année 1625, il eut naturellement par ses fonctions, des rapports avec Japin et peut-être l'entraîna-t-il dans le complot contre Richelieu qui échoua piteusement à la journée des Dupes en 1630. Peut-être Marie de Médicis, l'âme de la conspiration, qui s'enfuit de France en 1631, avait-elle un moment songé à se réfugier à Verdun où elle eût été fort mal en sûreté.

Quant à Japin, poursuit E. Pionnier, il amassa une respectable fortune que ses descendants allèrent dépenser à Paris et aux environs d'Étampes où ils s'étaient fixés. La maison inoccupée fut louée par les magistrats pour servir de logement aux lieutenants du roi ; elle fut ainsi la propriété en quelque sorte indirecte de la ville qui eût désiré l'acheter, mais qui ne le pouvait à cause du mauvais état de ses finances.


La façade principale et la Cour d’honneur

Or, en 1736 elle appartenait à Mme Marie-Thérèse de Brisacier, veuve du marquis de Boudeville, cousine et héritière de l'abbé Japin, chanoine de la cathédrale, qui la vendit aux moines de Châtillon au grand regret de la municipalité. Mais comme les moines n'avaient demandé ni l'avis des magistrats, ni l'autorisation du roi, formalités imposées par l'arrêt de 1665 aux ecclésiastiques qui voudraient s'établir ou accroire leurs biens dans l'intérieur de Verdun, opposition fut formée au contrat devant le conseil d'Etat qui annula le marché le 25 février 1737, et le 18 novembre, la ville acquit l'immeuble au prix de 18.000 livres. Les officiers municipaux en firent leur Hôtel de Ville dont ils prirent possession en grande pompe le 6 février 1738.


Le campanile et le fronton du corps principal
Pavoisement franco-européen sur la façade de l’Hôtel de Ville coté cour
et armoiries de la ville de Verdun

L’entrée de l'hôtel de ville se fait par un porche qui nous mène dans la cour où l’on découvre un ensemble de style Louis XIII composé d’un corps principal avec, en son sommet, un campanile, et de deux ailes.



En 1865, un bâtiment est rajouté à l'aile gauche de l'hôtel. Le 12 juillet 1886, l'hôtel de ville est classé aux Monuments Historiques. Sur le fronton du corps principal, les deux dates inscrites. La première, 1623, correspond à la date d’achèvement de construction du bâtiment. La seconde, 1898, correspond à la date à laquelle ont pris fin les travaux de reconstruction de l’édifice, ravagé par un incendie le 12 septembre 1894.


Le Monde illustré du 22 septembre 1894 ©️ gallica.bnf.fr

La façade postérieure et ses deux pavillons sont desservis par un long perron à rampe double auquel on accède par quatorze marches. Les fenêtres hautes et larges sont sobrement encadrées. Les frises et la corniche aux abondantes moulures sont soutenues par des consoles, que réunit un motif de fleurs et de fruits finement ciselés. Entre le rez-de-chaussée et le premier étage court une suite de cartouches enfermés dans une guirlande de fleurs et de draperies. Enfin, depuis l'incendie de 1894, qui a heureusement épargné l'extérieur, l'adjonction du fronton sculpté et du campanile a restitué au monument tout son caractère.



La cour avait été ornée des quatre canons d'honneur que l’on retrouve aujourd’hui à l’arrière du bâtiment côté jardin. Ces 4 canons, la Marie, le Barbu, la Livie et le Berceau ont été offerts à la Ville de Verdun le 23 novembre 1873 afin de rappeler la bravoure des Verdunois pendant les 81 jours de siège en 1870.


Les quatre canons-obusiersl les obus de 1870 et l’obus de 420 mm 
Bombe de 1000 kg lâchée sur Verdun par les avions allemands au cours 
du bombardement du 1er Septembre 1944
©️mmarchioro geneanet.org CC-BY-NC-SA


C'est à la date du mercredi 12 septembre 1894, que le feu s'est déclaré et a détruit en moins d'une heure, les trois principaux pavillons de ce beau monument. Tous les services ont été détruits ; les collections  du musée de Verdun (qui avaient été installées dans les locaux de l’hôtel de ville 20 ans plus tôt) n’ont pas été épargnées même si de nombreux objets et œuvres d’art seront malgré tout sauvés des flammes. 


Le Monde illustré du 22 septembre 1894 ©️ gallica.bnf.fr

Grâce à la vigilance de Louis Maury, maire de Verdun, et de tout le personnel de la mairie, on a pu sauver du désastre les papiers, comptes, registres de l'état civil, archives récentes et documents importants. C'est encore grâce à l'initiative prise par M. Maury qu'est due la conservation des archives municipales datant du XVIe siècle à la Révolution

En 1916, les obus s'abattent sur sa toiture. Ils n'empêchent pas la brigade de pompiers de Verdun de se terrer dans ses sous-sols. Au plus fort de la bataille de Verdun, le président Poincaré décerne la Légion d'honneur à la ville.


Au centre, l'hôtel de ville partiellement détruit au niveau du toit (1916)


Verdun, l'hôtel de ville après les derniers bombardements  (1917)
© Albert Samama-Chikli/ECPAD/Défense

A l'intérieur, le salon d’honneur occupe presque tout le premier étage du bâtiment principal. Il est décoré de nombreux tableaux représentant Verdun et Gerbéviller peints par Alfred Renaudin, ainsi que des tableaux représentant d’illustres Verdunois (Victor Schleiter, Chevert) et le Poilu de Verdun.

Rampe d’escalier à balustres

Le Salon d’honneur
François de Chevert né à Verdun le 2 février 1695, mort à Paris le 24 janvier 1769
Tableau peint en 1762 par Tischbein, légué par Chevert à sa ville natale

Le Poilu de Verdun (André Lagrange)

Offert par la Fédération Nationale des Associations d’Anciens Combattants de Verdun


Verdun - Le canal des Augustins et le canal Saint-Airy (Alfred Renaudin)

Victor Schleiter (D. Donzelli)

En 1925, le député-maire Victor Schleiter demande la création d'un musée où seraient exposés des documents relatifs à la Première Guerre mondiale : le Musée de Guerre. Celui-ci est composé de 3 salles.


Portrait de Victor Schleiter (maire de Verdun de 1925 à 1933)
S’est consacré à la renaissance de la Cité détruite par la Guerre
Salon d’honneur de l’Hôtel de Ville

La salle des décorations où sont exposées les huit médailles remises par Raymond Poincaré ainsi que les autres médailles décernées jusqu’en 1929 et la Croix de guerre 1939-1945, faisant de Verdun la Ville la plus décorée de France avec, au total, 26 médailles. 

Exécuté par quelques-uns de ceux qui se sont trouvés dans le secteur de Verdun pendant la bataille, le mobilier fut dessiné par le Directeur de la Maison Majorelle, qui était parmi eux, et travaillé dans les ateliers de cette maison à Nancy. Elle l'installa en 1929 dans le salon réservé, à l'Hôtel de Ville. 

Il comprend :

• Deux vitrines latérales à la cheminée, devant contenir les drapeaux 
• Une décoration sur la cheminée même, comprenant des lauriers sculptés et dorés, avec, au centre, les Armes de Verdun 
• Une table pour le Livre d'Or, avec un gros piétement encerclé de fer, et une vitrine posée dessus
• Une stèle recevant une plaque de marbre avec l'inscription « Aux Défenseurs de Verdun »
• Une autre stèle portant la statue de la Délivrance offerte par le journal « Le Matin »
• Et la vitrine centrale recevant un coussin brodé aux Armes de la Ville avec toutes ses décorations.


 Première  médaille obtenue le 12 septembre 1916 : la Légion d’honneur 

Aux Défenseurs de Verdun

La salle de Verdun et des généraux, où sont exposés, entre autres, des objets ayant appartenu aux grands chefs militaires, des photographies des destructions et des plaques commémoratives.


Buste du général Mangin

Terre recueillie à Notre-Dame de Lorette et offerte à la ville de Verdun
Évolution de l’uniforme du fantassin français 1870-1914 / 1915
Coq de l’enseigne de l’hôtel « Coq Hardi » de Verdun

La salle du Livre d’Or et des villages détruits, où sont exposées les livres d'or des soldats de Verdun ainsi que les diplômes et les Croix de guerre décernés aux villages détruits de la Zone Rouge.


Livre d’Or des soldats de Verdun


Diplômes et Croix de Guerre des 9 villages détruits de la Zone Rouge


L’heure de l’interro 


Sources 

  • Wikipédia



05/01/2023

Le portail de l’église de Mont-devant-Sassey

Le portail sud de l’église Notre-Dame-de-l’Assomption de Mont-devant-Sassey est considéré comme le portail gothique (XIIIe siècle) le mieux conservé en Lorraine. L’intérêt suscité pour ce joyau architectural ne semble pourtant dater que de la fin du XIXe siècle.



Pour la description du portail, nous utiliserons l’article rédigé en 1991 par Hubert Collin dans « Congrès archéologique de France » / gallica.bnf.fr


« L'église de Mont est certes connue pour ses parties romanes mais son portail n'est pas de médiocre intérêt en dépit de son mauvais état de conservation comme on va le voir. Le portail s'ouvre sur un côté de l'église, ici le côté sud, selon le dispositif si classique en Lorraine et dont les cathédrales elles-mêmes (Verdun, Metz) ont donné l'exemple. Le portail de Mont est gothique. Son ornementation sculptée, en particulier le décor des chapiteaux, permet de le dater du XIII° siècle avancé. La sculpture s'apparente à l'art de la cathédrale de Reims, mais le style des grandes statues, qui est archaïque et malaisé, est celui d'un atelier « provincial », pour employer le terme consacré par l'usage, quoique impropre.




Le porche 

En avant du portail s'élève un porche, formant comme une loggia. Le porche est un édicule octogonal, couvert d'ardoises, avec un gracieux portail extérieur à colonnes ioniques portant un fronton en segment d'arc. Il date de 1754. Il est dû à un architecte de Verdun nommé François Wadelaincourt. Il portait autrefois les armoiries des Condé, seigneurs du pays. Il est fort probable que ce porche servit jadis d'auditoire de justice. […]

La construction du porche couvert est postérieure de près de 5 siècles à celle du portail sculpté

Le porche proprement dit est, vu de l'intérieur, un édifice cherchant à imiter le gothique ancien. Il a pour couvrement une voûte à ogives rayonnantes. Les ogives prennent appui, dans les angles, sur des faisceaux de trois colonnettes à bagues. L'édifice peut faire illusion sous le rapport de l'ancienneté, mais il n'est pas antérieur au porche extérieur. A l'origine, il devait exister là, non un édifice en pierre mais un édifice en bois. De tels porches, destinés à protéger le portail des intempéries et à donner quelque abri aux paroissiens, ne sont pas rares. 


Mais lorsqu'on examine le portail de Mont, on constate qu'à plusieurs endroits, les pierres sont rougies par le feu. Il y a même certaines parties qui ont tellement souffert de la violence des flammes que les pierres, ainsi que les reliefs qu'elles portaient, ont éclaté. Selon toute vraisemblance, le porche de bois ayant existé ici a été la proie d'un incendie, et c'est celui-ci qui est responsable des dégâts causés aux sculptures. Il est même probable que c'est lors du siège de 1653 que le sinistre a été consommé. La statue du trumeau ayant été victime de l'accident, on peut se demander par quel miracle les deux vantaux du portail, qui paraissent du XVe siècle, voire du XIVe, ont pû demeurer intacts. Avaient-ils été déposés auparavant, comme trop faciles à défoncer ? 

Le portail 

Au rez-de-chaussée, il y a une petite arcature aveugle dont les colonnettes se dressent sur un stylobate où l'on peut s'assoir. L'arcature inférieure, de petites dimensions, est richement ornée : monstres, têtes grimaçantes et animaux dans les écoinçons, chapiteaux gothiques à feuillage et à crochets, bases à moulures aplaties, en « assiettes retournées ».

Arcature orientale 

Arcature occidentale

Sous les grandes statues, les arcatures sont décorées de petits-bas-reliefs
aux motifs païens (chouette, masques grimaçants, dragon ailé).

Au-dessus, dans des niches à dais architecturaux, on trouve des statues debout au nombre de cinq de chaque côté ; quatre dans les niches et une cinquième à l'extérieur, en bout de rangée, adossée aux colonnettes recevant l'archivolte et les ogives. 

Dais architecturaux constitués d’une frise de tours et de maisons

Ébrasement gauche et ébrasement droit

Le tympan 

Le tympan se divise lui-même en quatre registres horizontaux. Il porte lui aussi une iconographie intéressante. Le registre inférieur montre une Nativité, scène dissimulée en partie par une tenture. On distingue à droite l'Enfant-Jésus couché dans la crèche et, à l'extrémité, un personnage mutilé qui dut être un ange thuriféraire. Le registre médian présente, de gauche à droite, la Fuite en Égypte, l'Adoration des Bergers et l'Annonce aux Bergers ou l'Adoration des Mages, scène mutilée. Au registre supérieur, on ne distingue plus, à gauche, qu'un Massacre des Innocents, puis une scène détruite où Léon Germain de Maidy proposait de reconnaître le Miracle du champ de blé. Tout en haut, dans une niche, sous la clef de l'arc, il y a un personnage couronné, assis en tailleur par manque de place pour un trône plus conforme à sa dignité : c'est le roi Hérode qui régnait sur la Judée et qui, voyant dans le Christ un futur compétiteur éventuel à la royauté sur les Juifs, chercha à le faire mourir en ordonnant le massacre des Innocents.

Le tympan comporte quatre registres consacrés au cycle de l’Enfance du Christ.
Malheureusement, le tympan a souffert du temps et certaines scènes sont incomplètes,
ce qui rend l’identification parfois incertaine.
La Vierge couchée dissimulée par une énigmatique tenture/teinture rouge
L’Enfant Jésus dans la crèche accompagné du bœuf et de l’âne
L’Adoration des Bergers
La Fuite en Égypte
Le Massacre des Innocents

Les grandes statues

Nous avons évoqué leur gaucherie, mais leur intérêt iconographique est grand, leur signification collective d'un intérêt plus grand encore. Du côté droit se présentent d'abord Ève et Adam, demi-nus, avec des vêtements de feuillage, dans une attitude penaude qui sied à ceux que l'Archange vient de chasser du Paradis terrestre. Ensuite vient un Moise, porteur des tables de la Loi, en robe plissée, avec de part et d'autre du front les « cornes » de lumière qu'on s'attend à trouver chez le fondateur de la loi. Le personnage suivant est Abraham, les yeux au ciel, attendant l'ordre de sacrifier son fils Isaac debout devant lui, sur un bûcher non allumé. En bout de rangée se tient Noé, devant le feu du sacrifice offert après le Déluge. 

Ébrasement droit (de gauche à droite) : Ève (1), Adam (2), Moïse (3),
Abraham et Isaac (4), Noé (5)

Ève et Adam
La représentation de Moïse cornu viendrait d’une mauvaise traduction latine
du texte hébreux où le mot rayonnant aurait été traduit par cornu. 
Isaac, pieds et poings liés, est juché sur l’autel de l’holocauste.

Au premier plan, l’autel de l’holocauste préparé pour le sacrifice d’Isaac.
Au fond, Noé élève un autel à la gloire du Seigneur et y immole certains animaux purs
que l’on voit périr au milieu des flammes.
Sous la console est représenté un homme avec un oiseau.
Cet homme, aujourd’hui acéphale, est Noé qui sort pour juger du niveau des eaux
par la fenêtre qu’il a aménagée dans l’arche, comme il est écrit dans la Genèse.
L’oiseau n’est autre que la colombe envoyée par Noé pour voir si les eaux avaient
diminué à la surface de la terre. 

Du côté gauche, on voit d'abord une statue de la Vierge, la nouvelle Ève faisant pendant à l'ancienne. On trouve ensuite l'Archange Gabriel, celui qui fut le messager de l'Annonciation. Le troisième personnage doit être un Siméon ou un Zacharie [Marie Lekane y voit plutôt le prophète Isaïe], le quatrième un prophète Isaïe ou un saint Jean l'Évangéliste [Marie Lekane y voit plutôt le prophète Jérémie], à cause des tablettes d'écriture portées par lui. Le cinquième personnage enfin, un homme barbu, vêtu d'une toge plissée, portant une banderole et une église d'où s'échappe un cours d'eau, est le prophète Ézéchiel. Nous devons son identification à la sagacité de M. Léon Pressouyre.

Ébrasement  gauche  (de  droite  à  gauche) :  scène  de  l’Annonciation (6 et 7)  
Isaïe ? (8) , Jérémie ? (9) , Ézéchiel (10)

Marie lors de l’Annonciation. Elle laisse apparaître sur son visage un sourire,
typique des Vierges de l’Annonciation et lié à l’annonce de la bonne nouvelle.

L’archange Gabriel

La maquette de l’édifice portée par le personnage et le flot
d’eau qui en jaillit ont permis d’identifier le prophète Ézéchiel


Un érudit local, Jeantin, avait jadis identifié l'inconnu avec Pépin de Laden, fondateur de l'abbaye d'Andenne, par l'intermédiaire de sa fille Begga (sainte Begge). Pourtant, l'eau s'échappant d'un temple avait de quoi alerter tous ceux qui connaissent un tant soit peu la liturgie du Temps pascal. Léon Pressouyre a su rétablir la vérité, dans sa splendeur éclairante.

Nous sommes en présence ici d'une figuration de la vision d'Ézéchiel, l'eau sortant du Temple. Pour saint Jérôme, cette eau salutaire était la doctrine du Christ. C'était aussi une allusion au baptême. Pour Rupert de Deutz, la vision d'Ézéchiel était prophétique. Elle symbolisait l'eau sortant du côté du Christ. L'Église étant le corps mystique du Christ, l'eau était celle de la Rédemption par le baptême. […] Et Léon Pressouyre de conclure en ajoutant que l'arche de Noé était le type même du symbole de la Rédemption baptismale, dès les premiers temps du christianisme.

De part et d'autre de l'entrée du porche, à l'intérieur, deux statues placées dans des niches complètent la série des statues du portail. L'une représente le roi-prophète David, couronné et tenant un livre ouvert. L'autre personnage est reconnaissable à la verge qu'il tient : c'est le prophète Aaron.

Le roi David soutient un livre ouvert de ses deux mains
(probablement le livre des Psaumes)
Le prophète Aaron tenant la Verge fleurie, 
symbole de l’enfantement du Christ par la Vierge

Nous avons dit que la statue du trumeau avait disparu. Il n'en reste que l'auréole, sous le dais architectural qui couronnait le tout. Que représentait la statue ? En bonne logique, ce devait être une statue de Notre-Dame, puisque l'église de Mont est placée sous l'invocation de la Vierge.

Le trumeau était probablement orné d’une Vierge en pied.
Les portes en bois d’origine datent du XIVe siècle.


Les voussures


Les claveaux des quatre arcs s'ornent d'une série de petits personnages assis ou debout. Une moitié d'entre a été détruite par le feu. Un examen rapide permet de reconnaître parmi eux des personnages choisis au sein des Douze Apôtres et des Évangélistes. On reconnaît aussi certaines scènes tirées de l'Écriture sainte. L'archivolte elle-même est décorée de rinceaux et de fleurs. »

Les voussures rougies par le feu probablement au XVIIe siècle 




Pour compléter cette description rédigée par Hubert Collin en 1991, prenons le temps de lire un extrait de l’étude réalisée par Marie Lekane en 2012 concernant la  lecture globale du portail de l’église de Mont-devant-Sassey.

« Avant toute chose, nous devons insister sur la concomitance de réalisation et de mise en place des statues. En effet, des caractéristiques communes ont pu être dégagées de l’ensemble. Au terme de cette étude iconographique, il apparaît dès lors que le programme iconographique de l’église de Mont-devant-Sassey est unitaire et réfléchi. La lecture typologique justifie la présence des personnages de l’Ancien Testament par leur lien avec le Nouveau. Ce lien est déterminant dans la compréhension de la présence des prophètes de l’Ancienne Alliance. Les couples d’Adam et Ève et de l’Annonciation sont spatialement liés et leur opposition symbolique est connue : Marie est la nouvelle Ève et son Fils, matérialisé au tympan, rachète le péché originel. Cette opposition symbolique constitue le pivot de la lecture typologique, le noeud sémantique du portail montois. Ézéchiel et Noé sont également placés en vis-à-vis ; tous deux préfigurent le sacrement du baptême.

De  la  même  manière,  les  personnages  de  l’ébrasement  droit répondent à la logique typologique. Moïse préfigure à la fois le Christ et saint Pierre. Il symbolise l’Ancienne Loi que Jésus n’abolit pas mais accomplit. Les correspondances typologiques établies entre les épisodes de la vie de Moïse et de Jésus sont nombreuses. Le serpent d’airain perché est le symbole de l’élévation du Christ sur la croix. L’offrande par Abraham de son unique fils préfigure l’immolation de Jésus sur la croix par son Père. Dans les deux cas, il y a consentement du sacrifié. Noé préfigure également le sacrifice du Christ. Il offre à Dieu des animaux et des oiseaux purs. Cet holocauste rétablit le contact entre Dieu et les hommes. En considérant que la statue disposée aujourd’hui dans la niche occidentale représente le roi David, ce personnage revêt également un sens christologique important, car il est non seulement une préfigure du Christ, mais également son ancêtre direct. Les présences combinées de Moïse, d’Abraham et de Noé évoquent la rédemption par le sacrifice de la croix. Les quatre scènes de sacrifice des voussures consolident la vision anagogique du sacrifice du Christ pour la Rédemption de l’Humanité.

À l’ébrasement gauche, sans que les identités des statues soient certaines, il est tout à fait possible qu’elles accompagnent et amplifient la scène de l’Annonciation. Ainsi Aaron et Ézéchiel sont-ils connus pour être des annonciateurs de la maternité virginale de la Vierge. La sacralité et la virginité de la Vierge sont aussi mises en exergue au tympan, dans la mise en scène peu commune de la Nativité. Les apôtres et les évangélistes des voussures sont des témoins de la vie, du Ministère et de la divinité du Christ. Ainsi, malgré les nombreuses représentations de la Vierge, il ne s’agit pas d’un programme mariologique, étant donné que  ce  ne  sont  pas  des  épisodes  de  la  vie  de  Marie  qui  sont  mis  en évidence.  Mais  Marie  constitue  le  « réceptacle  du  Christ »  et  le  pivot entre l’Ancienne et la Nouvelle Alliance. »

 L’heure de l’interro

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Sources et bibliographie